Mariana Braescu. Je me souviens et j’imagine
31-05-2012

Mariana Brăescu, Je me souviens et j’imagine, traduit du roumain par Marie Jeanne Lutic, Éditions Carpathia, 2012

Les charmes du passé

 Ces « histoires pleines de magie », dont l’auteur nous précise qu’elles ont été écrites à la fin de l’année 1987, plongent le lecteur dans un passé qui, comme le titre l’annonce, tient autant de la mémoire que du rêve, du souvenir que de l’imagination, du réel que du mystère. C’est ce qui en fait le charme, dans tous les sens du terme : des récits aux confins de l’enfance et de la vieillesse, du merveilleux et du fantastique, et aussi des drames auxquels nul ne peut se soustraire.

Artur Silvestri, qui était le compagnon de Mariana Brăescu, dit l’essentiel dans la postface du livre, lorsqu’il définit ces textes comme « un message énigmatique, une communication venant de l’imprécis, sans prendre de forme claire, qui conservaient la forme baroque d’alluvions et de réceptacles de sensations […]. C’était alors, déjà, un livre sans âge, écrit sans explications contiguës, qui communique en hiéroglyphes une série de conclusions sans les développer, conclusions que l’on sous-entend ou devine par voie intuitive ».

Le fait est qu’on se laisse volontiers toucher par la prose poétique de l’auteur, rythmée par les apparitions et les disparitions, les départs et les retours de personnages attachants et pittoresques, métamorphosés parfois en fantômes, en fées, en figures artistiques, en êtres mythiques, en héros tragiques. Autour d’eux la nature – les arbres, les fleurs, la terre – crée un cadre dans lequel se mêlent les sensations de toutes sortes, inséparables de la vie pleinement assumée.

Car c’est bien de la vie qu’il s’agit, à travers les images, les parfums, les sons du passé : la vie de la narratrice, certes, mais aussi la vie de tous ceux qu’elle a connus, côtoyés, aimés, qui ont disparu peu à peu ou brusquement ; la vie qui contient les espoirs, les bonheurs, les malheurs, les rêves, les illusions, la mort. Je me souviens et j’imagine, recueil dont la cohérence et la variété se combinent harmonieusement, est à coup sûr « le livre d’une émotion ».

Jean-Pierre Longre